En le voyant, on se dit qu’à l’époque il ne fallait pas lui en raconter. Il sort péniblement de sa grosse Mercedes, marche vers moi en boitant la fine moustache souriante. Me tend sa main, les yeux fatigués mais toujours autant malicieux. Depuis vingt ans c’est chez lui que je me fournis en charbon de forge. Ça vient de Pologne m’avait-il dit la première fois ! Quelques connaissances communes avaient rapproché la discussion…
La dernière fois, je ne lui avais pas tout pris son stock, il devait rester cinq à six sac de 25 kg sur la palette. J’vous les garde, plus personne ne forge aujourd’hui… Faut croire que si ? Ce matin la palette avait disparu et les sacs envolés ! Je me suis alors retrouvé dans son bureau avec l’ambiance de toute une époque où l’affaire tournait rondement. Il a sorti un classeur hors d’âge, tourné des intercalaires… Surtout vous leurs téléphonez bien avant d’y aller ! J’ai été ému de le voir bien appliqué, écrire ces quelques lignes, le stylo perdu dans sa grosse main. La loupe sur le bureau servant à vérifier si les numéros du téléphone de son confrère sont bien les mêmes que sur le papier. Fin d'une époque.
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